Mallarmé
. Et la parole de l'imâm
Préface de Christian Bobin
Parution
Ce livre donne une joie étrange, comme celle que peut engendrer la vision d’un flocon de neige dansant entre terre et ciel, ivre d’aller à
la rencontre de sa propre mort.
La toupie d’une pensée tourne avec les pages. Sa pointe est appuyée sur cette intuition : la parole audible, seule digne d’être écoutée car seule vraie, est la parole qui renonce à être sa propre lumière, pour s’éprouver buée sur le miroir du langage seul divin. Telle est la parole du poète, ou celle de l’imâm.
La belle invention de ce livre est de détacher l’écrivain de toute appartenance esthétique, et le saint de toute soumission doctrinale. Encore faut-il préciser : personne n’est poète. Personne n’est saint. Seul le langage l’est quand il renonce à saisir l’insaisissable et qu’il n’est plus qu’un effet de sidération du poète ou du priant.
La vérité n’est pas atteinte dans le chant du soufi, pas plus qu’elle ne l’est dans la phrase surnaturellement obscure de Mallarmé. C’est l’inverse : ce sont eux – le soufi qui tourne autour de la poussière de son âme, et le poète qui demande à l’univers mutique d’écrire son livre absolu – qui sont soudain malgré eux atteints par la vérité informulable. Blessés par la lumière. À terre.
Christian Bobin
La toupie d’une pensée tourne avec les pages. Sa pointe est appuyée sur cette intuition : la parole audible, seule digne d’être écoutée car seule vraie, est la parole qui renonce à être sa propre lumière, pour s’éprouver buée sur le miroir du langage seul divin. Telle est la parole du poète, ou celle de l’imâm.
La belle invention de ce livre est de détacher l’écrivain de toute appartenance esthétique, et le saint de toute soumission doctrinale. Encore faut-il préciser : personne n’est poète. Personne n’est saint. Seul le langage l’est quand il renonce à saisir l’insaisissable et qu’il n’est plus qu’un effet de sidération du poète ou du priant.
La vérité n’est pas atteinte dans le chant du soufi, pas plus qu’elle ne l’est dans la phrase surnaturellement obscure de Mallarmé. C’est l’inverse : ce sont eux – le soufi qui tourne autour de la poussière de son âme, et le poète qui demande à l’univers mutique d’écrire son livre absolu – qui sont soudain malgré eux atteints par la vérité informulable. Blessés par la lumière. À terre.
Christian Bobin