Le voile d'Isis
. Essai sur l'histoire de l'idée de Nature
Collection NRF Essais
Gallimard
Parution
Un aphorisme hante la philosophie occidentale : celui d'Héraclite, qui veut que «la Nature aime à se voiler».
Près de vingt-cinq siècles durant, ces quelques petits mots ont successivement signifié : que tout ce qui naît tend à mourir ; quer la Nature s'enveloppe dans des formes sensibles et dans des mythes ; qu'elle cache en elle des vertus occultes ; mais également que l'Être est originellement dans un état de contraction et de non-déploiement ; ou bien encore qu'il se dévoile en se voilant. Ainsi cet aphorisme aura-t-il servi à expliquer les difficultés de la science de la nature, à justifier l'exégèse allégorique des textes bibliques ou à défendre le paganisme, à critiquer la violence faite à la nature par la technique et la mécanisation du monde, à expliquer enfin l'angoisse qu'inspire à l'homme moderne son être-au-monde.
La même formule, illustrée par l'image du voile d'Isis et déployée par Pierre Hadot dans l'histoire de l'Occident, aura justifié, par suite de contresens créateurs, l'attitude prométhéenne - l'homme doit se rendre maître et possesseur de la Nature - comme l'attitude orphique - nul ne peut soulever le voile des mystères de la Nature, sinon le poète et l'artiste. Elle n'aura jamais cessé de tracer des perspectives nouvelles sur la réalité et de révéler les attitudes les plus diverses à l'égard de la Nature.
Par là, elle confirme le propos de Nietzsche : « Une bonne sentence est trop dure à la dent du temps et tous les millénaires n'arrivent pas à la consommer, bien qu'elle serve à tout moment de nourriture.»
Près de vingt-cinq siècles durant, ces quelques petits mots ont successivement signifié : que tout ce qui naît tend à mourir ; quer la Nature s'enveloppe dans des formes sensibles et dans des mythes ; qu'elle cache en elle des vertus occultes ; mais également que l'Être est originellement dans un état de contraction et de non-déploiement ; ou bien encore qu'il se dévoile en se voilant. Ainsi cet aphorisme aura-t-il servi à expliquer les difficultés de la science de la nature, à justifier l'exégèse allégorique des textes bibliques ou à défendre le paganisme, à critiquer la violence faite à la nature par la technique et la mécanisation du monde, à expliquer enfin l'angoisse qu'inspire à l'homme moderne son être-au-monde.
La même formule, illustrée par l'image du voile d'Isis et déployée par Pierre Hadot dans l'histoire de l'Occident, aura justifié, par suite de contresens créateurs, l'attitude prométhéenne - l'homme doit se rendre maître et possesseur de la Nature - comme l'attitude orphique - nul ne peut soulever le voile des mystères de la Nature, sinon le poète et l'artiste. Elle n'aura jamais cessé de tracer des perspectives nouvelles sur la réalité et de révéler les attitudes les plus diverses à l'égard de la Nature.
Par là, elle confirme le propos de Nietzsche : « Une bonne sentence est trop dure à la dent du temps et tous les millénaires n'arrivent pas à la consommer, bien qu'elle serve à tout moment de nourriture.»